Comprendre les impacts du numérique et explorer les solutions - Interview de Mathieu

Comprendre les impacts du numérique et explorer les solutions - Interview de Mathieu

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Peux-tu nous dire ce qui t'a amené à être consultant spécialisé en numérique responsable ? 

Bonjour, merci Barbara pour cette opportunité de raconter mon parcours et cet intérêt que j’ai développé pour le numérique sobre et responsable. 

Etant né entre les générations 80 et 90, j’ai vécu comme beaucoup les transformations numériques successives de notre société avec un regard fasciné et rêveur. Grand adepte des jeux vidéo dès la première PlayStation, mon parcours a été marqué par les discours prometteurs des technologies du futur. Le métavers de Zuckerberg ou le voyage sur Mars d’Elon Musk étaient déjà des certitudes personnelles il y a 15 ans, quand je devais choisir mon parcours post-bac et l’orienter vers les sciences physiques et technologiques. 

En 2011, pendant mon voyage en Australie, j’ai rencontré un géologue français qui travaillait dans l’une des mines de l'OutBack (très loin dans l’intérieur des terres, loin de toute ville ou village). Il m’a raconté son travail, la sélection des zones d’extractions selon le type de roche, les analyses de probabilités de trouver des métaux recherchés, la rareté de ces ressources, la problématique d’extraire d’énormes quantités pour obtenir quelques grammes d’or, de cuivre ou autres métaux utile à l’industrie, mais aussi les techniques de séparation qui utilisent des produits très toxiques et de l’eau potable venant directement des nappes phréatiques du sous-sol, la même eau potable qui est utilisé par les populations. 

Sans le savoir, cette rencontre a entretenu des questionnements intérieurs sur l’organisation de la société actuelle, sur ces objets technologiques que nous utilisons quotidiennement,  sur ces fractures invisibles entre la réalité des dégâts de leur chaîne de production et l’impression que l’objet final nous donne : clean, moderne, attirant, répondant à tous nos besoins, etc.

Pour comprendre ce phénomène, j’ai décidé de bifurquer dans mes études, de poursuivre la voie de la sociologie, de la science des rapports humains et de l’organisation en société. J’ai ensuite réalisé un master en management de projet puis un stage dans le secteur des entreprises du numérique (ESN et autres sociétés spécialisées dans l’IT). 

Les excès de ce secteur que je pouvais ressentir, tout en voyant que j’étais encore incapable de les démontrer, m’ont poussé à changer de voie à nouveau. 

Recruté par le CNRS, au sein d’un Institut spécialisé sur le climat et l’environnement, c’est là que j’ai consolidé mon projet, compris l’équilibre nécessaire entre discours scientifique et discours de sensibilisation et appris les bases de la facilitation et de l’animation d’ateliers pour engager les personnes à s’inscrire dans un projet plus grand que nous-même. 

J’ai alors monté ma propre activité de conseil sous le nom de mon entreprise : Princip’actions où j’accompagne les entreprises et organismes dans une transformation responsable de leurs pratiques en me basant sur une philosophie de vie humaniste et pragmatique (comme vous le verrez par la suite).   

Quels sont les différents impacts du numérique sur l'environnement ? 

Vous l’aurez compris, une partie de ma sensibilisation au numérique vient de mon expérience directe avec le début de la chaîne de valeur de nos équipements, c’est-à-dire l’extraction des matières premières permettant la fabrication de produits numérique et leur utilisation. 

Aujourd’hui, grâce aux études de l’ADEME, de l’alliance Green-IT, d’Eco-Info du CNRS ou encore du Shift Project, nous savons que l’extraction et la fabrication sont responsables de 70 à 80% des impacts du numérique sur l’environnement.

Parmi les impacts du numérique sur l'environnement, nous parlons souvent des effets sur le réchauffement climatique qui sont certes important : 3% à 4% des émissions mondiales de GES (et en forte augmentation, 15% à 20% prévu d’ici à 2050) mais il existe également d'autres impacts environnementaux :

  • Zones dévastées par les mines,
  • Espèces vivantes empoisonnées par les eaux polluées par les produits toxiques utilisés et rejetés par les processus de séparation des minerais

Pour donner un ordre de grandeur, lors de la fabrication d’un ordinateur de 2kg il faut utiliser 200 kg d’énergies fossiles (pétrole, gaz, etc.), 600 kg de minerais (métaux, terres rares, etc.) et des milliers de litres d’eau. Aujourd’hui dans le monde, nous comptons près de 2 milliards d’ordinateurs.

Ce ratio est à peu près le même pour un téléphone, pour 120 g de produit fini, comptez environ 70-90 kg de matières premières extraites et nous avons près de 4 milliards de smartphones dans le monde.

Si on généralise à tous les équipements numériques, il faut savoir que nous en avons environ 36 milliards dans le monde, multiplié par autant de fois l’ordre de grandeur précédent pour connaître la quantité de matières extraites de la croûte terrestre. Et si le doute persiste, il est tout à fait faux de croire que notre exploitation minière se fait dans des conditions respectueuses. 

Quelles sont les solutions pour les entreprises pour limiter l’impact environnemental du numérique ?

1. Sensibiliser les collaborateurs

Les entreprises doivent commencer par la sensibilisation des collaborateurs. Pourquoi ? Parce cela permet à chaque employé et chaque partie prenante, d’avoir un vocabulaire commun, de s’appuyer sur une base commune de connaissances pour comprendre les enjeux et réfléchir ensemble aux actions à mettre en œuvre. 

La sensibilisation sur les impacts est importante car elle permet de réaliser que le confort individuel immédiat ne peut plus être un choix prioritaire face à l’inconfort systémique qu’engendre nos comportements actuels :

  • Conflits géopolitique pour l'accès aux matières premières
  • Pollution des eaux et des sols
  • Tension sur l’accès à l’eau potable en période de sécheresse

2. Agir sur les équipements numériques et infrastructures existantes

L’allongement de la durée de vie de votre matériel a un impact direct sur la diminution des demandes en extraction de ressources. Voici une liste d'actions que votre entreprise peut mettre en oeuvre pour allonger la durer de vie des équipements numériques de l'entreprise :

  • Allongement des garanties des produits
  • Prise en compte des effets d'obsolescence
  • Evaluation de l'indice de réparabilité des équipements lors de l’achat
  • Entrainement des équipes à prendre soin de leur équipement en développant une pédagogie sur les impacts positifs des nouvelles pratiques (exemple : garder 1 an de plus votre smartphone correspond à Xkg de CO2 évités, ou ressources abiotiques sauvegardées, même chose pour tous les équipements numériques)
  • Système de mutualisation lorsqu’elle n’impacte pas la productivité ou la qualité des services de votre entreprise
  • Se former à l’éco-conception de vos services numériques (plus d’information en fin d’article)

3. Planifier les actions futures

  • Création d'une nouvelle politique d’achats responsables : prenant en compte les critères ESG, les labels des fabricants responsables, la fin de vie des équipements, etc.
  • Systématisation de la sensibilisation régulières des équipes pour faire perdurer les comportements plus vertueux
  • Déploiement de services numériques éco-conçu

Comment mettre en place une bonne sensibilisation sur la sobriété numérique ?

Une bonne sensibilisation passe par l’appropriation des sujets abordés par l’ensemble des participants.

1. Choisir le bon bon format : la fresque du numérique

En se basant sur l’intelligence collective, les ateliers de l’association Fresque du numérique (inspirée de la Fresque du Climat) rencontrent un grand succès dans les entreprises et auprès du grand public pour aborder ces enjeux de sobriété numérique. 

Au fur et à mesure de l'atelier, le sujet est découvert et débattu par les participants. Ils prennent part à la création d’une fresque qui retrace les liens entre notre usage actuel du numérique et ses conséquences directes sur notre environnement. En fin d’atelier, nous proposons des actions possibles et à inventer, afin d’éclairer les participants sur les pistes de solutions qui existent et celles qui méritent d’être déployées à plus grande échelle. 

2. Briser les idées reçues

Un autre enjeu d’une bonne sensibilisation est de casser les idées reçues. Non les mails ne sont pas des vecteurs importants de pollution environnementale (peut-être qu’ils le sont pour le bien-être au travail mais c’est une autre histoire) ! C’est même l’inverse, s’en occuper pour les supprimer peut amener à consommer plus d’énergie que si vous les laissiez stocker sans y toucher. 

Les études et outils de diagnostic de nos impacts liés à l’usage du numérique arrivent et sont de plus en plus précis et efficaces ! Nous avons d’excellentes équipes de travail qui se penchent sur le sujet, comme l’APCC ou Boavizta qui vous permettront de connaître avec précision les impacts liés à vos mails et ceux liés aux infrastructures.

3. Choisir les bons indicateurs d'impacts

Une bonne sensibilisation sur la sobriété numérique passe également par le choix des bons indicateurs d’impacts. Il sera d’ailleurs plus facile d’envisager les actions concrètes auxquelles vous devriez vous intéresser selon votre secteur après cette phase de sensibilisation circonstanciée. 

4. Cas : Accompagnement du Crédit Agricole

Pour donner un exemple, le Crédit Agricole a déployé la Fresque du numérique pour toutes ses équipes du pôle Groupe Infrastructure Plateform (CA-GIP).

Cette mise en commun du niveau de connaissances sur les enjeux numériques a donné lieu à des discussions très intéressantes et concrètes sur les actions envisageables au sein du groupe. Chaque participant a pu apporter sa vision de son métier et parfois partager sur les contradictions entre le système mis en place par habitude et les efforts qu’ils se sentent prêts à faire.

Dès lors, l’équipe du pôle RSE de l’entreprise a pu prioriser leur efforts dans la mise en place de leur plan d’actions selon les retours qu’ils ont obtenus de ces ateliers et obtenir le soutien des collaborateurs dans la mise en œuvre de ces actions. 

Quelles sont les actions à mettre en place concernant les achats du numérique responsable ?

Si vous êtes concerné par votre politique d’achat liée au numérique, vous trouverez une information très fournie dans le guide pour des achats numériques responsable (rédigé en collaboration avec l’INR, MTE, DINUM, la DAE et de nombreux autres acteurs).

Vous y trouverez notamment :

  • Des fiches pratiques par segment d’achats : matériels bureautique, solutions d’impression, réseaux et télécoms, infrastructures d’hébergement, etc.
  • Des conseils sur les labels existant sur le marché européen tel que : EPEAT, EnergyStar, AngeBleu, TCO, etc.
  • Des informations sur la législation, c'est à dire que nous pouvons attendre de la loi en termes d’achats responsables. 

Quelles sont les actions à mettre en place en termes de design et d'éco-conception ?

Je terminerai sur cette question de l’éco-conception dans le design de nos services numériques. Deux sources très utiles pour y répondre :

1. Qu'est ce que l'éco-conception ?

L’écoconception est une méthode qui vise à limiter les impacts environnementaux d’un produit ou d’un service numérique en questionnant les besoins et en prenant en compte l’impact environnemental dès la conception et sur tout le cycle de vie, dans une démarche d’amélioration continue, en intégrant les principes de minimisation, stabilité, efficacité et maintenabilité” 

D’après cette définition, l’écoconception s’intéresse principalement aux enjeux environnementaux, mais en pratique, cela a une visée plus large incluant également des enjeux sociaux et psychologiques du numérique comme l’accessibilité, l’économie de l’attention et l’inclusion. 

2. Quels sont les enjeux de l'éco-conception ?

1er enjeu : la durabilité du produit

Soit dit autrement, lutter contre l’obsolescence des terminaux causée par les couches logicielles. L'objectif associé : réduire la consommation de ressources (RAM, CPU).

2ème enjeu : bien définir le besoin

D’après ces guides, 45% des fonctionnalités d'un produit numérique ne sont jamais utilisées et 70% ne sont pas essentielles. Quelques questions pour y répondre :

  • L’utilisation du numérique pour ce service est-elle nécessaire ? 
  • Quel est le ratio destruction/création de valeurs ?
  • La valeur ajoutée du service justifie-t-elle la mobilisation des ressources requises  ?

3ème enjeu (à priori à déconstruire) : aller au plus près du besoin réel de l’utilisateur

Sans que cela se fasse au détriment de son expérience utilisateur. Le levier d’action : le principe de simplicité et d’interface épuré. 

Il existe bien d’autres d’autres conseils, que vous pourrez retrouver dans les guides cités plus haut, ou dans celui-ci dont s’inspire les deux premiers : Éco-conception web - Les 115 bonnes pratiques 

Par ailleurs, l’écoconception est une démarche standardisé que vous pouvez utiliser dans votre stratégie de communication : ISO - IEC 62430:2019 - Écoconception (ECD) — Principes, exigences et recommandations

Un mot de conclusion ?  

Ainsi, pour conclure, je dirais que la sobriété numérique est aujourd’hui un sujet aux contours bien définis, les outils ne manquent pas pour faire son bilan, préparer un plan d’actions, sensibiliser ses collaborateurs et agir concrètement dans la réduction des impacts liés à nos usages du numérique. 

Les connaissances sont accessibles à toutes et tous et nous pourrions dire qu’il n'y a plus qu’à, mais souvent il manque le temps, l’énergie et la pédagogie pour y arriver.

Ma mission est de vous y aider en vous accompagnant sur toute la démarche, en animant les réunions de décisions, les ateliers, et en vous conseillant sur la base des connaissances que je vous ai présenté ici. 

Mathieu Regnauld de la Soudière

Facilitateur de transformation durable et éthique au service de l’humain et de la nature. 

contact@principactions.com

06.65.79.79.78

www.principactions.com (site en migration vers un hébergeur et concepteur plus responsable)

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